Ça fait un an que je suis en Israël, mais c’est la première fois que je vois Jérusalem. Depuis que je suis arrivé, je suis enfermé quelque part dans le désert du Néguev. Jeudi dernier, on nous a forcés à signer un document en hébreu, qu’aucun de nous ne pouvait lire. Ils nous ont dit que c’était notre ordre de libération, puis ils nous ont emmenés dans le centre de détention d’Holot. On ne peut pas sortir du centre la nuit, et on doit pointer trois fois par jour. C’est perdu au milieu du désert, à une heure et demie en voiture de la première ville. C’est comme une prison. On a entrepris une grève de la faim, mais plusieurs migrants Soudanais ont décidé que ce n’était pas suffisant et ont commencé cette marche vers Jérusalem. D’autres Erythréens ont préféré ne pas participer.
« On ne sait pas ce qu’il va se passer ensuite, mais on n’a pas le choix »
On sait très bien qu’on risque d’être arrêtés. Une voiture de police nous suit en permanence. Mais on s’en moque, on veut que notre message passe, et montrer aux gens que nous sommes des manifestants pacifiques, et que nous souffrons. Pour la plupart, nous avons fui des pays en conflit, où il est impossible de retourner. Mes deux parents ont été tués au Darfour, j’étais en danger là-bas. Nous sommes venus à Israël pour trouver un refuge, mais au lieu de ça, on nous traite comme des criminels et on nous met en prison. Si Israël ne nous considère pas comme des réfugiés, qu’il nous transfère dans un autre pays qui pourra le faire.
Nous n’avons pas eu de problème durant notre marche, mais nous avons eu besoin de l’aide d’activistes israéliens pour trouver un endroit où dormir, ils nous ont aussi distribué des couvertures car il faisait extrêmement froid [les températures durant cette période sont exceptionnellement bases en Israël, trois des migrants ont été hospitalisés dimanche à cause du froid]. Nous sommes heureux de voir que des Israéliens marchent avec nous et nous comprennent. On ne sait pas ce qu’il va se passer ensuite, mais on n’a pas le choix, il faut qu’on continue.